DE LA SENSIBILISATION À LA RÉVOLTE. L’ANTISPÉCISME : LA DÉSOBÉISSANCE EN HÉRITAGE / Conférence-débat organisée par l’A.E.P.P. avec la participation de Geoffroy de Lagasnerie (Paris - 08.03.18)
Cette conférence était rythmée par une série de questions préparées par Samuel et Sophie, abordant le positionnement politique de 269 Libération Animale (notamment son inscription dans une pensée de « gauche » mais aussi les liens avec les mouvements anarchiste et antiscapitaliste) et les choix stratégiques de l’association : l’occasion de revenir sur la question de la violence (définition et légitimité), sur l’usage du corps comme « outil politique » mais aussi sur notre manière d’appréhender la désobéissance civile et notre volonté de lui adjoindre une dimension de confrontation réelle afin de dépasser le registre purement symbolique dans laquelle la cantonne une définition trop classique et libérale, malheureusement majoritairement adoptée dans les mouvements animaliste et écologiste aujourd’hui encore. Nous avons enfin développé notre idée phare de créer un nouvel espace et une nouvelle temporalité de la contestation antispéciste en plaçant l’Etat en état de dépossession par rapport à nous au moyen de nouvelles pratiques de résistance inventives et offensives ; en imposant notre propre calendrier afin de : « trouver des moyens de résister à l’Etat sans réagir à l’Etat ».
La répression inédite et particulièrement violente que subissent les deux fondateurs de 269 Libération Animale aura occupé une large part du débat et permis à Tiphaine et Ceylan de théoriser de nouvelles perspectives pour l’association sur ce volet et leur volonté d’attaquer directement les ordres policier et judiciaire.
Une conférence qui nous a permis de réaffirmer notre position car si l’objectif commun est de sortir les animaux de la catégorie des marchandises, il est cependant vrai qu’on ne peut dresser un tableau uniforme du mouvement de libération animale. Au-delà du refus de la marchandisation des animaux, les antispécistes ne sont pas unanimement pour l’abolition du monde de la marchandise, du salariat, de l’entreprise privée, de la concurrence et de la recherche du profit. La plupart des militants des droits des animaux ne sont pas dans une logique visant à subordonner la libération animale à un profond changement de modèle économique et social. C’est une grave erreur selon nous : vouloir corriger les effets nocifs sans changer foncièrement de système est une totale aberration. Le capitalisme est un système sacrificiel, détruisant les plus faibles « pour que ceux d’en haut soient maintenus en haut », comme l’écrit le romancier et journaliste américain Upton Sinclair. Il faut lire « La Jungle » pour comprendre que l’organisation industrielle des abattoirs de Chicago préfigure malheureusement notre destin. La question animale est aujourd’hui l’un des volets de la remise en question d’un système que l’on peut appeler capitaliste, à condition qu’on ne le réduise pas à l’opposition entre patronat et salariés. Fondé sur l’exploitation illimitée des autres vivants et même des nations par d’autres nations, il doit être combattu. Nos rapports aux animaux révèlent ce que nous acceptons de faire à des êtres qui sont différents de nous mais qui nous ressemblent aussi beaucoup, en raison de leur sentience (Sur cette question et le positionnement de 269 Libération Animale, lire : [ Ссылка ]).
Cette conférence faisant intervenir des penseurs non étiquetés « animalistes » nous semble essentielle pour sortir de ce processus d’ostracisation dont la cause antispéciste souffre, une cause qui néglige à tort son inscription dans une pensée plus généraliste sur les luttes politiques contemporaines.
➡️ Geoffroy de Lagasnerie est philosophe, sociologue et l’auteur de plusieurs ouvrages déterminants pour toutes celles et ceux qui ont à coeur de développer de nouveaux modes d’interpellation politique et dont nous recommandons fréquemment la lecture :
• « Penser dans un monde mauvais », éd. PUF, 2017.
• « Juger. L’Etat pénal face à la sociologie », éd. Fayard, 2016.
• « L’art de la révolte. Snowden, Assange, Manning », éd. Fayard, 2015.
➡️ L’A.E.P.P. (Association des Étudiants Protestants de Paris) est un lieu unique et précieux, un espace propice à l’échange des savoirs et à la formation de l’esprit critique qui accueille des interventions de grande qualité dans le souci d’aider les étudiants à faire de leur période de formation universitaire un véritable temps de développement humain.
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🎥 Capture : Dimitri Brugnot
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