La Bleuite l'autre guerre d'Algerie.
La Bleuite est la plus grosse opération d’infiltration, de désinformation, d’intoxication jamais montée par les services secrets militaires français contre l’appareil du FLN et de l’ALN, à Alger et dans tout le maquis rebelle.
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En 1957, au cœur des ruelles obscures de la casbah d'Alger s'est déroulée la plus vaste opération jamais montée par les services français contre le FLN algérien. Son nom : la « Bleuite ». Cette opération complexe a été conçue et organisée par un seul homme : le capitaine Paul-Alain Léger. Ni la France qui a gagné cette guerre de l'ombre, ni l'Algérie qui en a payé le prix fort, n'aiment évoquer cette intervention.
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Pas seulement en raison de son nom, la « bleuite » pourrait s’apparenter à une maladie virale, contagieuse, voire honteuse ; de celles que l’on tait malgré les traces laissées sur la peau. Et des stigmates, cette opération d’infiltration et de manipulation menée par les services français lors de la guerre d’Algérie, en aura laissé, tant sur les corps torturés que dans les mémoires.
Il n’est pour s’en convaincre que d’écouter, aujourd’hui, Rémy Madoui, ex-membre de l’ALN (Armée de libération nationale) raconter à mots comptés les tortures que lui infligèrent ses frères d’armes, pendant deux semaines. Une éternité. Avant qu’il parvienne, par miracle, à s’évader.
Cette guerre secrète, retorse, qui entraîna une purge effroyable au sein de l’armée algérienne, n’est pas de celles que l’on raconte volontiers, d’un côté comme de l’autre de la Méditerranée. Aussi est-ce l’un des grands mérites de Jean-Paul Mari que de retracer avec minutie cet épisode méconnu, en s’appuyant sur de maigres archives, et les témoignages éclairants et émouvants d’anciens maquisards.
Le capitaine Paul-Alain Léger, cerveau de l’opération « Bleuite ».
L’épisode a pour prélude et pour cadre la Casbah. C’est là, au plus fort de la bataille d’Alger, que le capitaine Paul-Alain Léger choisit de lancer, en 1957, une opération d’infiltration et de déstabilisation de ce bastion FLN. Rompu en Indochine à la technique de « retournement de l’ennemi », ce fin psychologue forme très vite une petite équipe de « bleus » qui ne cessera de grossir au fil des semaines.
Grâce à ces hommes, arborant pour certains des bleus de travail, mais aussi à quelques femmes – comme la fameuse Ouria –, l’officier français parvient à arrêter Yacef Saadi, chef FLN de la Zone autonome d’Alger. La ZAA décapitée, Paul-Alain Léger la « ranime » avec une redoutable duplicité. Le temps pour lui d’intoxiquer l’ALN, tout particulièrement le colonel « Amirouche le terrible », en lui faisant croire que ses troupes sont infestées d’agents doubles. Le poison de la suspicion inoculée, la « bleuite » peut alors se répandre dans tout le maquis. Aveuglement et paranoïa faisant le reste, elle conduira à une vaste purge au sein de l’ALN. Purge dont, aujourd’hui encore, on ne peut dénombrer les victimes – certains avancent le chiffre de 4 000 morts –, ni mesurer les conséquences réelles qu’elle eut sur l’Algérie naissante.
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